dimanche 20 octobre 2013

Désertification médicale : Fuir l'ennui !

Il est un paramètre que l'on prend rarement en considération quand on évoque la désertification médicale ou plus précisément l'exode rural des praticiens. Il s'agit d'un phénomène encore plus difficilement mesurable que l'éloignement des grandes villes, la fermeture des instituons publiques ou les moyens de transport réduits.
Il s'agit de l'ennui. Ce sentiment qui effraye tant nos congénères n'est pas uniquement lié aux trop rares distractions dans nos campagnes. Il concerne également l'activité professionnelle, notamment dans les petits centres hospitaliers. Pour des carabins nourris aux épisodes trépidants d'Urgences, la vie dans un établissement de proximité peut en effet parfois manquer d'adrénaline. C'est ce que nous raconte un jeune urgentiste blogueur, alias "docteur Capuche" dans un de ses derniers posts (publié sur le blog "Betadine pure") qui détaille, comme avant lui Borée, les raisons pour lesquelles "malgré les demandes répétées des équipes soignantes", il ne restera pas  travailler "far far away". "Comme précisé plus haut, far faraway est loin, très loin.
 
Et certaines spécialités ne sont présentes qu'au CHU. Une partie non négligeable des interventions SMUR consiste donc en des "secondaires", c'est-à-dire des transferts de patients d'un hôpital à un autre. Et c'est loin d'être la partie la plus intéressante du métier de smuriste (que le premier qui pense le contraire me jette le premier scope). Et c'est encore pire quand il faut 2h30 de route pour aller d'un hôpital à l'autre, et que le départ est donné à 3h du matin. Parfois, je m'ennuie au SMUR de far faraway" décrit-il. Voici une dimension sans doute essentielle pour comprendre certains des enjeux de la désertification médicale, une dimension cependant difficile à intégrer dans un discours politique.

Problème des urgences : lits d'aval, mais aussi soins d'aval

Le post du Dr Capuche est également un témoignage en lien direct avec l'actualité lorsqu'il évoque les difficultés du service des urgences de son hôpital, probablement situé en montagne. A l'instar de ce qui a été beaucoup dénoncé ces derniers jours, il confirme le casse tête que peut représenter la recherche de lits d'aval, "surtout pendant les mois d'été où un tiers des lits sont fermés alors que l'activité augmente". Mais au-delà de ce problème récurent, il évoque des difficultés spécifiques aux structures rurales, qui sont moins fréquemment citées. "Il y a aussi le problème de la prise en charge médicale des patients en aval des urgences. Ou plutôt de la prise en charge chirurgicale des patients en aval des urgences.
 
La phrase type des chirurgiens quand ils sont sollicités est "faites monter" (les services de chirurgie sont au 4ème étage, les urgences au 1er sous-sol), quel que soit le problème du patient, même s'il existe une urgence à la prise en charge. Le souvenir le plus prégnant que j'ai de cette situation est le cas de cette patiente âgée, vivant toute seule chez elle, qui s'était fait une fracture ouverte de la jambe (...) vers 21h. Non seulement le chirurgien n'a pas voulu l'opérer le soir même (...) mais j'ai par la suite appris que la patiente n'avait pas été opérée du tout. Parce qu'il y avait une plaie en regard de la fracture. Alors que c'est l'élément qui fait qu'il doit y avoir opération.
 
Le serpent qui se mord la queue". Ainsi apparaît-il qu'au delà des obstacles géographiques (évoqués par le Dr Capuche), de la difficulté d'attirer un conjoint dans un endroit reculé (raison qui tient fortement à cœur à notre auteur) la désertification s'explique aussi par le refus des jeunes praticiens d'une médecine paralysée et paralysante. Une équation rarement intégrée dans les réflexions sur ce thème.
Pour lire en entier les raisons pour lesquelles le Dr Capuche ne restera pas "Far, far away", c'est ici :http://betadinepure.eklablog.com/pourquoi-je-ne-resterai-pas-travailler-a-far-far-away-a101993131
 
Source : www.jim.fr

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