dimanche 13 octobre 2013

Burn-out médical : Le rals le bol des Internes et des médecins généralistes

La moitié des internes en médecine générale se disent menacés par le burn-out (4 000 internes ont été interrogés lors de cette enquête)*. "65,4 % des internes en stage hospitalier travaillent plus de 50 heures hebdomadaires", cela peut atteindre 90 heures pour un stage aux urgences ou en chirurgie. Il en est de même par nombre de médecins.

Depuis la réforme du plein temps à l’hôpital (Debré), on a mis la sphère médicale un peu à part du droit du travail. La triple mission : soins, enseignement et recherche, est devenue incompatible avec la semaine "des 35 heures". Il y a de plus un tabou, les internes ont l’habitude de se taire, car ils ont le plus souvent besoin d’un poste de chef de clinique ou envie de faire carrière dans le service". Ceux qui se rebellent risquent d’être mis au placard par quelques mandarins tous puissants.                                                                   
La limitation de la durée de travail instaurée par la loi est inapplicable, selon le porte-parole de l’Inter syndicat national des internes des hôpitaux (ISNIH). "Cela impliquerait des embauches et la réorganisation des services", explique-t-il. Quand un interne travaille comme un larbin 80 à 90 heures par semaine pour faire tourner le service, c’est de l’esclavage et c’est dangereux.
Le repos de sécurité, instauré il y a 10 ans, qui prévoit qu’un interne doit disposer d’une période de repos de 24 heures à l’issue d’une garde n’est pas respecté. Quant aux médecins 50 % se disent au bord du "burn-out".
1) Les études médicales n’ont pas été réformées depuis la suppression des concours
Externat et Internat. Cela décourage l’élitisme et oriente les étudiants vers les carrières les moins contraignantes. La surcharge de travail des spécialités lourdes (anesthésie, chirurgie, obstétrique) explique ce "ras-le-bol", ce d’autant que la récompense n’est plus au rendez-vous.
L’accès est libre en faculté avec 56 000 étudiants en 1re année. Le "numerus clausus" impose ensuite une sélection draconienne, même si l’on a porté à plus de
8 000 le nombre de places en 2e année. C’est un gâchis (17 % de reçus). En conséquence, plus de 20 000 étudiants français sont partis faire leurs études à l’étranger (Belgique et Roumanie), reviendront-ils ?
L’augmentation des effectifs ne pourrait avoir d’effets significatifs qu’après 2015. La féminisation qui appelle le temps partiel et les carrières écourtées atteint 70 %, ce qui rend toute prévision aléatoire.
Un étudiant coûte chaque année 30 000 euros. Il faut stopper ce gâchis. L'entrée en faculté de médecine devrait être limitée en séparant d’emblée le médical et la paramédicale ou par une réorientation en 2e année, mais l’égalitarisme et le droit à l’accès libre ne le permettent pas !
2) L’ENC (l’Examen National Classant) offre plus de places qu’il n’y a de candidats
La suppression du concours de l’INTERNAT en 2002 empêche toute sélection puisqu’elle a été faite dès le début des études de médecine sur des critères qui ne permettent pas de savoir s’ils donneront de bons praticiens (cette sélection qui ne fait pas appelle au raisonnement élimine les QI supérieurs à 120, comme le montre une étude sérieuse du ministère des Universités chez les recalés).
L’absentéisme lors des stages hospitaliers dans le but de mieux préparer l’ENC détourne l’étudiant de la formation clinique. De nombreux postes hospitaliers dont les gardes sont trop fréquentes et les responsabilités trop lourdes ne sont même plus choisies. Nombre d’étudiants préfèrent redoubler une année plutôt que de choisir une spécialité ou une ville de faculté qui ne leur conviendrait pas.
Ainsi 600 postes de médecine générale ne sont pas pourvus depuis plusieurs années (un peu plus de 200 en 2013). Avec un zéro on peut être interne. C’est une insulte au bon sens. La réforme prévoit d’obliger l’étudiant à commencer son cursus pour avoir le droit de repasser l’ECN l’année suivante pour un meilleur choix.
L’informatisation du classement ne changera pas la situation. Il faudrait régionaliser l’examen ou purement supprimer cet examen ubuesque.
3) La filiarisation du cursus des internes et l’évolution des Diplômes d’études spéciales (DES)
Elles devront être réorientées. Nos spécialités sont différentes de celle des autres pays européens et présentent de graves lacunes pour assurer la continuité des soins à l’hôpital avec l’hyperspécialisation. On a créé en France une spécialité de médecine générale de 3 ans. 
Le risque est de former des médecins dans le "moule hospitalier", prescripteurs d’examens complémentaires, d’investigations coûteuses, qui manquent de pratique. Ils n’exerceront pas la médecine générale pour la majorité.
Les internes en médecine trouvent que leur DES devrait être porté à 4 ans. Il faudrait au contraire le raccourcir avec des stages de ville plus intensifs en 5e et 6e année. De plus, une spécialité de médecine aiguë et "d’acute care surgery" devrait être créée pour faciliter la prise en charge libérale des urgences.
- La nouvelle spécialité de médecine générale : elle entraîne un allongement des études médicales en dispensant une formation plus scientifique que clinique. Ces médecins seront ainsi, comme l’hôpital qui les a formés, de forts prescripteurs d’examens complémentaires, souvent plus coûteux qu’utiles. Ils n’auront aucune notion des réalités de l’exercice libéral, qui nécessite un contact direct avec le patient.
Ils n’exerceront que pour moins de 10 % d’entre eux. On parle de prolonger d'un an l'internat de médecine générale. 12 ans d'études c'est trop. Il faut au contraire les raccourcir d'un an ce qui mettrait "sur le marché" 4 000 médecins de plus chaque année.
Par égalitarisme, ils réclament un clinicat. Un chef de clinique consacrera 50 % de son temps à l’enseignement. C’est une erreur, la médecine générale doit s’apprendre pendant l’externat dans les services au lit du malade et par compagnonnage en cabinet médical.
Les internes pourraient animer les maisons de santé et bénéficier d’une formation en spécialité de médecine aiguë et en bobologie, ce qui éviterait la saturation des urgences hospitalières.
- En chirurgie : le classement moyen du choix de la chirurgie est passé de la 1 091e à la 1 508e place en 5 ans et la chirurgie viscérale est en fin de classement !
Des internes formés à la traumatologie et aux urgences abdominales devraient participer à la prise en charge des urgences, à côté des urgentistes. Cette évolution éviterait des catastrophes créées par le nombre de retards d’appels au chirurgien, dans l’attente des examens complémentaires coûteux et souvent inutiles dans certains UPATOUS.
La formation évolue vers l’ultra spécialisation. Le jeune chirurgien, angoissé par la dérive judiciaire, ne se formera plus que dans la spécialité exclusive qu’il lui sera, demain seule autorisée d’exercer. Comment se formerait-il, même s’il le souhaitait, alors que 70 % des interventions chirurgicales sont faites dans le privé ?
Les nouvelles technologies permettent à des "non-chirurgiens" d’étendre leur champ opératoire, telles la chirurgie radio opératoire, l’endoscopie transviscérale (NOTES/Natural Orifice Transluminal Endoscopic Surgery) et la robotique. Le "viscéraliste" devra intégrer toutes ces techniques comme un pilote d’avion et devra se recycler en permanence.
- Les hôpitaux sont hypertrophiés et suradministrés : avec 60 millions de mètres carrés, nos hôpitaux ont un parc immobilier gigantesque (domaines, immeubles, forêts, vignobles). Avec 100 000 médecins et un million de salariés, ils sont pléthoriques, mais le temps consacré aux soins diminue avec la multiplication des contraintes.
30 000 médecins qui ne sont pas titulaires ou issus de notre cursus occupent des postes vacants car mal rémunérés. 75 % des chirurgiens cardiaques ne sont pas issus de nos diplômes. 20 % des postes de chirurgie viscérale ne sont pas pourvus.
Le déséquilibre entre le nombre d’administratifs et de soignants s’aggrave. Il y a en effet jusqu’à 9 strates administratives dans les grands ensembles hospitaliers.
Conclusions
Les mesures coercitives à l'installation seront la règle du fait de la mise en place des ARS et du SROS. Des "tribunaux d'exception" dans les tutelles sont prêts à tourner contre les médecins. Nos confrères ne pourront ni bénéficier d'un avocat, ni avoir accès aux pièces du dossier. Elles décideront de votre avenir, de votre projet de vie et d'installation.
Ces médecins seront-ils "défendus" par ceux-là mêmes qui ont signé ces accords, les représentants des syndicats signataires non représentatifs ! Toutes ces mesures vont aller à l’encontre du but recherché, un accès aux soins pour tous et des économies.
* D’après la thèse de Valériane Komly et Antoine Le Tourneur et le Quotidien du Médecin, et mes articles dans AAIHP.
 

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