1/
Une époque bien lointaine
Le
concept de médecine d'urgence remonte à l'antiquité - IV siècle avant JC. Hippocrate définissait ainsi la notion d’urgence : « Il faut profiter de l’occasion de porter
secours avant qu’elle n’échappe et on sauvera ainsi le malade pour avoir su en
profiter ». Dans son Traité des maladies, il dit « Il ne suffit pas d’intervenir un peu après, la plupart a succombé. Un secours
qui est utile est un secours donné à temps ». Il en déduit ainsi qu’il faut
agir vite et propose aux médecins qu'ils aient en permanence leur trousse (de
soins) "sous la main". Il ira même jusqu'à leur conseiller de
s'engager dans l'armée afin d'y apprendre la chirurgie.
On notera à cet effet
l'importance des guerres dans le développement des techniques d'urgence et des
avancées médicales.
L’armée romaine fût à l'origine de la création des premiers
hôpitaux militaires fixes appelés les "valetudinaria".
L'excellence de ses armes défensives lui permis de limiter ses pertes humaines
et de développer le concept du ramassage des blessés et des premiers soins
réalisés par des médecins de "l'avant".
Aucun progrès notable ne verra le jour durant l'époque du
moyen-âge dans l’assistance et les soins donnés aux blessés. Ceux-ci mourront
de leurs blessures sur le champs de bataille ou bien, seront dévorer par les
loups. Seuls les personnages importants sont évacués sur une civière...
Un nouvel essor marque le VI siècle avec l'empereur Mauricius sous
l’Empire byzantin. Celui-ci sera à l'origine de la création d'un corps
d’infirmiers ("les despotatoi")
chargés du ramassage des blessés.
2/ Des figures françaises
emblématiques
Ambroise Paré |
Le XVI siècle voit l'apparition des armes à feux. Des blessures
d'un nouveau genre font leur apparition. Outre les plaies pénétrantes, les
hémorragies traitées par amputations et au fer rouge, un chirurgien permis
l'arrêt de cette technique en pratiquant l'arrêt des hémorragies par ligature
des vaisseaux; ce chirurgien s'appelait Ambroise Paré.
Au XVIIIème siècle, grâce aux travaux du Dr Tissot, on invente la
notion d’urgence auprès des noyés. En effet, celui-ci écrit: « lorsqu’un noyé a été plus d’un quart d’heure
sous l’eau, on ne doit pas avoir de grandes espérances de le réanimer » ;
ou encore : « C’est sur le bateau même où
on a repêché le noyé que l’on doit commencer les premiers secours ». Louis
XV en 1740 promulgue l’édit royal : « avis pour donner secours aux noyés »,
véritable protocole de prise en charge de ces victimes. Ainsi naquît pour la
première fois une organisation des secours médicaux civils.
3/ L'après Révolution
Française
Dominique Jean Larrey |
Le 24 août 1790, en pleine tourmente révolutionnaire, la
Convention vote une loi qui donne aux pouvoirs publics la responsabilité des
secours, par l’intermédiaire des communes. Puis, en 1792, les chirurgiens
Larrey et Percy mettent en place le 1er système de soins urgents aux soldats
blessés sur le champ de bataille. Ils organiseront ainsi des centres de soins.
Pour sa part, Larrey concevra des ambulances volantes pour effectuer le
ramassage des victimes. Celles-ci seront composées de trois chirurgiens et d'un
infirmier. Au fur et à mesure des guerres de l'Empire, il les fera évoluer et
inventera la notion de triage : « Il faut
toujours commencer par le plus douloureusement blessé, sans avoir égard aux
rangs et aux distinctions », écrira-t-il dans ses mémoires après la
bataille de Iéna.
En 1859, lors de la bataille de Solferino, Henri Dunant, bouleversé
par le massacre qui se déroule sous ses yeux, porte secours aux blessés avec
300 volontaires, il fondera ensuite la Croix-Rouge en 1863.
4 /L'expérience américaine
Outre Atlantique, lors de la Guerre de Sécession aux Etats-Unis,
une véritable organisation moderne du service de santé militaire apparaît, avec
des médecins et des infirmiers formés spécialement à cet exercice.
Ambulance de l'hôpital Bellevue, New York, 1869 |
A New York le service des ambulances de l’hôpital Bellevue a été
établi en 1869. Si le blessé ne parait
pas transportable au poste de police, l’alerte est donnée directement à
l’hôpital par l’appareil télégraphique le plus proche. 43 secondes
après...l’ambulance sort de l’hôpital. Ces voitures sont légères et attelées
d’un seul cheval. A l’intérieur se trouve un brancard monté sur un rail, une
caisse est aménagée avec des instruments, des médicaments. Le médecin est assis
à l’arrière et le cocher actionne au pied une sonnerie afin de demander le
passage.
Fin XIX siècle, le Dr Henry Nachtel rentre d'un voyage des
Etats-Unis où il a observé leur système
des ambulances médicalisées centralisées par un standard. Celui-ci crée en 1887,
l’œuvre des ambulances urbaines à l’hôpital Saint Louis. Six arrondissements
sont reliés par un système d’avertisseur télégraphique à une station, où deux
ambulances fonctionnent avec un cocher ambulancier et un interne ambulancier de
garde 24 heures sur 24. Ils sont chargés du ramassage et du conditionnement des
blessés sur la voie publique. Ce système, précurseur de notre SAMU fut
abandonné en 1907 ; les infirmiers remplacent désormais les médecins. A
l’époque, le corps médical, peu intéressé, n’est pas convaincu de la
médicalisation des ambulances.
5/ De l'héritage des deux
guerres mondiales
Un nouveau tournant majeur allait marquer l'histoire de la
médecine d'urgence ; les deux guerres mondiales du XX siècle.
Hôpital de campagne, 1ère guerre mondiale |
La première fût marquée par l'ampleur des combats qui rendaient
les secours bien aléatoires. De plus, les conditions précaires d'hygiène
imposaient aux chirurgiens d'opérer le plus simplement possible : "nettoyage et emballage" telle était
la devise. La deuxième guerre mondiale fût bien plus atroce et bien plus
meurtrière. Cependant, l’anesthésie, le traitement du choc, la transfusion se
sont développés et donnent naissance à une nouvelle spécialité : la
réanimation.
TSH de la 2ème guerre mondiale |
Durant la guerre d'Indochine en 1950, la médicalisation de l'avant
prend tout son sens avec notamment la présence de réanimateurs proche des zones
de combats. De plus, le transport des blessés par hélicoptère permet de sauver
des cas chirurgicaux jugés désespérés jusqu'alors.
6/ L'émergence du secours
médical français : Le SAMU - SMUR
Louis Lareng |
En France, en 1956, la conjonction d'une mortalité accrue liée aux
accidents de la voie publique ainsi que d'une épidémie de poliomyélite pousse
les pouvoirs publics à réfléchir sur la médicalisation de vecteur terrestre
permettant le transport des blessés et des patients présentant une insuffisance
respiratoire aigüe. En 1964, Le Pr Lareng avec l'appui de la Sécurité sociale
proposera le premier projet d'un SMUR avec à son bord un infirmier et un
médecin.
En 1965, la création des services d’urgences et des services de
réanimation dans les hôpitaux se distinguent des SMUR.
Service Mobile d'Urgence et de Réanimation de Créteil (94) |
Face à l'augmentation des SMUR sur le territoire, il faudra
attendre 1970 pour assister à la création d'une salle de régulation assurant la
coordination de plusieurs SMUR ; le SAMU était né.
En 1978, les SAMU deviennent centre 15. Désormais, les pouvoirs
publics disposent d’un outil performant et efficace : un service public avec
régulation médicale et médicalisation des urgences préhospitalières les plus
graves.
Médecin régulateur du SAMU |
- réception et tri des appels via un numéro unique (15)
- assurer une écoute 24h/24 et apporter un conseil médical
- assurer l'envoi et la coordination des moyens de secours les plus adaptés dans les délais les plus rapides
- assurer la coordination des SMUR et de leurs Unités Mobiles Hospitalières (UMH)
- vérifier la disponibilité des lits d'hospitalisations publiques ou privés afin d'orienter le patient vers la structure le mieux adapté à sa pathologie
- participation à l'élaboration et à l'organisation des différents plans de secours (ORSEC, plan blanc, plan rouge)
- assurer la formation des personnels médicaux et paramédicaux aux soins d'urgences via les Centres d'Enseignements des Soins d'Urgences (CESU)
7/ Les vecteurs du SAMU : les
SMUR
Véritable bras armé du SAMU, ce service est la plupart du temps
rattaché à un Service d'Accueil des Urgences (SAU) ou bien, à un Département
d'Anesthésie et de Réanimation (DAR). La réglementation qui régit le
fonctionnement des SMUR est extrêmement bien encadrée par le législateur[2].
Unité Mobile Hospitalière du SAMU-SMUR Avicenne (93) |
Le service est composé de vecteur terrestre (Unité Mobile
Hospitalière, Véhicule Radio Médicalisé) ou aérien (hélicoptère), véritable
"hôpital roulant", permettant aux personnels du SMUR de se rendre au
chevet des patients nécessitant des soins urgents.
La philosophie française, en effet, est d'amener "l'hôpital" au patient
et de le stabiliser avant de le transporter vers le service le plus adapté à
son état (rôle du SAMU de rechercher une place d'hospitalisation), là où, au
contraire, le système anglo-saxon (Etats-Unis, Grande Bretagne, Canada...),
considère que le patient doit être évacué le plus rapidement possible vers un
Trauma Center référent, et les soins dispensés durant le transport. Ces deux
systèmes ont fait l'objet d'une multitude de débats dont je m'abstiendrai, ici,
de toute analyse.
Ces véhicules disposent de l'ensemble du matériel nécessaire à la
réalisation des soins d'urgence et de réanimation[3].
Les personnels à bord des UMH, sont tous des professionnels de
l'Urgence. La réglementation en vigueur (Loi de 1986) définit sa composition, à
savoir :
- Un Ambulancier Diplômé d'Etat (ADE)
- Un médecin qualifié en Médecine d'Urgence
- Un Infirmier Diplômé d'Etat (IDE)
8/ Le personnel paramédical du
SMUR
En ce qui concerne le personnel IDE, on ne peut que constater le
mode aléatoire de fonctionnement d'un SMUR à un autre.
En effet, L’article 10 du décret de compétences du 11
février 2002[4],
concernant l’infirmier anesthésiste diplômé d’Etat indique que « l'infirmier
anesthésiste diplômé d'Etat est seul habilité, à condition qu'un médecin
anesthésiste-réanimateur puisse intervenir à tout moment, et après qu'un
médecin anesthésiste-réanimateur a examiné le patient, à réaliser les actes
suivants... » et que « les transports sanitaires visés à l'article 9 du
présent décret sont réalisés en priorité
par l'infirmier anesthésiste diplômé d'Etat. »
L’infirmier anesthésiste est
donc un acteur de choix dans l’urgence préhospitalière, mais
il n’en a pas l’exclusivité.
Selon l’article 10 ci-dessus, ses compétences en anesthésie ne
peuvent s’exprimer qu’en présence d’un médecin anesthésiste. Hors, le médecin
de bord se trouve être, dans la majorité des cas, un médecin urgentiste. Le
législateur n'a pas prévu de cadre spécifique à cet état de fait.
Aussi, la décision d'employer un IDE ou un IADE au SMUR en revient
donc au Chef de Service ainsi qu'au Directeur de l'établissement concerné.
1/ Loi n°86-11 du 6 janvier 1986, relative à l'aide médicale urgente et aux transports sanitaires, www.samu-de-france.fr/fr/vie_samu/presentation
2/ Décret SMUR, n°97-620 du 30 mai 1997, relatif aux conditions relatif aux conditions techniques de fonctionnement auxquelles doivent satisfaire les établissements de santé pour être autorisés à mettre en oeuvre des services mobiles d'urgence et de réanimation et modifiant le code de la santé publique.
3/SFAR, Recommandations concernant les modalités de
la prise en charge médicalisée préhospitalière des patients en état grave,
www.sfar.org/accueil/articles.php?id_article=4
4/Décret n°2002-194 du 11 février 2002 relatif aux actes professionnels et à l’exercice de la profession d’infirmier
Source :
- "Gestion de l'abord veineux périphérique en SMUR dans le cadre de l'arrêt cardiaque de l'adulte", mémoire Ecole d'Anesthésie, M. HERBRETEAU, Mai 2011
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